SEAPODYM

Décrire la dynamique spatiale des populations de poissons pour étudier l’effet de la pêche et de la variabilité environnementale en vue de produire de meilleurs conseils scientifiques et de gestion

Près d’un tiers des captures mondiales de thons proviennent de la zone économique exclusive des 22 États et Territoires insulaires du Pacifique occidental et central. Les thons sont de grands prédateurs et de grands migrateurs, et nous savons que leurs habitats favoris, l’abondance de nourriture et leurs habitudes de déplacement sont influencés par les conditions climatiques. Une bonne gestion de leurs ressources thonières est donc importante pour garantir la croissance économique durable et la sécurité alimentaire de ces nations face au changement climatique. En modélisant la dynamique des populations de thons (la façon dont les stocks évoluent au fil du temps et les raisons de cette évolution), nous cherchons à comprendre les fluctuations et à en produire une description quantitative, ainsi qu’à prévoir les tendances futures concernant la dynamique des stocks. Ces informations sont cruciales pour faciliter la prise de décisions de gestion fondées sur des données factuelles.

Le défi consiste à trouver le moyen de simplifier les nombreuses composantes d’un écosystème et la multitude d’interactions entre elles pour parvenir à un modèle pouvant être utilisé de façon pertinente. Une grande quantité d’informations relatives aux nombreuses variables océaniques est nécessaire pour créer des modèles réalistes et détaillés des processus dynamiques à l’œuvre. Les scientifiques de la Division FAME travaillent avec des partenaires internationaux depuis des années à l’élaboration d’un modèle numérique capable de tenir compte d’un vaste éventail de données afin d’étudier ces interactions et de produire des conseils à l’intention des gestionnaires des pêches.

La première version ayant été conçue en 1995, le SEAPODYM (Spatial Ecosystem And Population Dynamics Model, ou modèle de simulation spatiale des écosystèmes et de la dynamique des populations) est désormais un cadre de modélisation numérique permettant d’étudier la dynamique des populations de thons sous l’influence des conditions environnementales et de la pêche. Il a d’abord servi à étudier l’influence de l’oscillation australe El Niño (ENSO) sur la productivité et les taux de capture de bonites dans le Pacifique occidental et central et s’est révélé être un outil efficace de modélisation de la variabilité des populations de thons en fonction du climat. Un travail international a permis au SEAPODYM d’évoluer en continu pour devenir un cadre général réunissant une très grande quantité de données d’observation et des connaissances biologiques ou écologiques concernant différentes espèces de thons et d’autres grands prédateurs.

Faisant la synthèse des connaissances actuelles sur la biologie, l’écologie et la dynamique des populations aux principaux stades du cycle de vie de plusieurs espèces de thons, le cadre de modélisation du SEAPODYM peut rendre de précieux services aux États et Territoires insulaires océaniens, étant donné l’importance capitale de la pêche thonière pour leur développement socioéconomique. Outre les effets considérables de l’ENSO sur les taux de capture, qui ont déjà nécessité une gestion concertée de la pêche à la senne entre dix pays océaniens, la région du Pacifique fait face à un plus grand défi : le changement climatique. La modélisation du SEAPODYM a permis d’établir des projections concernant la nouvelle distribution des thons dans le Pacifique à l’horizon 2050 selon différents scénarios d’émissions de gaz à effet de serre. Ces projections sont ensuite utilisées lors de l’évaluation des risques relatifs à la viabilité des économies des pays insulaires océaniens dépendantes des thons.

Le cadre de modélisation du SEAPODYM est conçu pour répondre aux besoins d’évaluation des stocks. Il fournit des informations plus précises sur les effets de la pêche en raison de sa structure spatiale détaillée et constitue par conséquent un outil numérique efficace de planification spatiale et d’évaluation des stratégies de gestion spatiale. Un autre grand avantage de ce modèle est que les effets de la pêche peuvent être facilement distingués des effets de la variabilité environnementale sur la population modélisée. Par exemple, il peut aider à comprendre des relations observées entre plusieurs éléments, comme les liens entre les fluctuations des captures de thons et les épisodes El Niño, grâce à des descriptions quantitatives des habitats et des dynamiques des populations. Enfin, le SEAPODYM permet d’établir des prévisions saisonnières et décennales, à condition que des prévisions fiables de variables océaniques soient disponibles.